Relancer les infrastructures africaines pour stimuler le commerce

L’actualité récente en Afrique a été marquée par l’adoption de la Zone de libre-échange continentale (ZLEC). Celle-ci, dont le défi majeur sera sa mise en oeuvre effective, offre au continent l’opportunité d’accélérer le commerce intra-africain qui est un vrai vecteur de réduction de la pauvreté, en droite ligne avec les priorités de la Banque africaine de développement (BAD). Car il y a encore d’importants défis à relever.

Les échanges commerciaux intra-africains ont enregistré une légère progression ces dernières années, passant de 12 % en 2013 à 17 % en 2017, mais restent faibles – 68 % pour l’Union européenne et 50 % pour l’Asie de l’Est. La part du commerce global détenue par le continent est passée de 3,2 % en 2013 à 2,4 % en 2017, une régression qui souligne l’effort restant à faire dans trois domaines : les infrastructures régionales afin de faciliter la connectivité des pays sans littoral, des petits Etats insulaires et des pays en transition aux marchés régionaux et internationaux ; le financement du commerce (pour accroître la participation des entreprises locales dans les chaînes de valeur régionales et globales) et la promotion des investissements intra-Africains en vue de créer des marchés plus vastes et compétitifs et renforcer le secteur privé.

L’Afrique compte 54 Etats, dont 16 enclavés : nous sommes le continent avec la plus forte concentration de pays enclavés dans le monde. L’intégration régionale est le seul moyen d’attirer des investissements directs étrangers (IDE), qui s’accompagnent souvent de transferts de compétences et de technologies, et les investissements transfrontaliers. Ces cinq dernières années, la BAD a investi plus de 15 milliards de dollars dans la construction d’infrastructures régionales (transport, énergie, TIC et eau). Un exemple en est l’expansion du port de Lomé avec un financement de 60 millions d’euros de la Banque, facilitant le transit des produits vers les pays voisins enclavés que sont le Mali, le Burkina Faso et le Niger.

L’écart du financement du commerce en Afrique est aujourd’hui estimé à 100 millions de dollars. En réponse, la BAD a, au cours des quatre dernières années, soutenu le financement du commerce à hauteur de 6,6 milliards de dollars. Les secteurs clefs aidés sont l’agriculture (22 %) et l’industrie (25 %) avec les échanges commerciaux intra-africains représentant au moins 20 % de la totalité des activités commerciales soutenues. En 2016, les investissements intra-africains étaient de 10 milliards de dollars, représentant 16,8 % des IDE vers l’Afrique. Il faut absolument promouvoir les IDE intra-Africains au fort potentiel de développement inclusif et d’intégration régionale car beaucoup plus diversifiés en termes de pays et secteurs, comparativement aux IDE en provenance de l’extérieur du continent, plus axés sur les économies africaines et les producteurs de pétrole majeurs.

Les défis du financement pour développer notre continent restent immenses. L’Africa Investment Forum (AIF), dont la première édition s’est tenu à Johannesburg du 7 au 9 novembre 2018, vise à développer une réserve de projets susceptibles d’apporter des transformations structurelles, notamment sur le plan des infrastructures. L’objectif est d’harmoniser les procédures, de réduire les coûts d’intermédiation, d’améliorer la qualité de la documentation sur les projets et de renforcer les engagements entre gouvernements africains et secteur privé.

Khaled Sherif  est vice-président de la Banque africaine de développement en charge du développement régional, de l’intégration régionale et de la prestation de services.

Source: Les Échos 

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