Gabon: EBOMAF, le nouveau géant économique en remplacement d’Olam ?

Un an après l’arrivée au pouvoir des militaires au  Gabon, les promesses de rendre l’économie aux Gabonais semblent compromises. Alors que les discours initiaux en septembre 2023 affichaient une volonté ferme de replacer les acteurs locaux au cœur de la gestion des secteurs clés du pays, une nouvelle réalité économique semble émerger, marquée par la montée en puissance d’EBOMAF, un conglomérat burkinabè, au détriment des entrepreneurs gabonais.

De l’hégémonie d’Olam à celle d’EBOMAF

Sous le régime d’Ali Bongo, le géant singapourien Olam avait pris une place prépondérante dans l’économie gabonaise, contrôlant des secteurs stratégiques comme l’agriculture, la gestion de zones économiques et même des infrastructures portuaires et aéroportuaires. Cependant, la Transition politique ne semble pas avoir brisé ce cycle de dépendance envers des entreprises étrangères. À la place d’Olam, un nouvel acteur, EBOMAF, dirigé par le Burkinabè Mahamadou Bonkoungou, étend désormais son emprise sur plusieurs pans de l’économie.

EBOMAF : un acteur omniprésent dans les secteurs stratégiques

D’abord actif dans le BTP, où il s’est vu confier d’importants chantiers d’infrastructures routières, notamment ceux reliant Akanda, Libreville et Owendo, EBOMAF a progressivement étendu son influence. L’entreprise s’est récemment vu accorder une concession de 20 ans pour l’exploitation de la ligne maritime Libreville-Port-Gentil à travers la Compagnie Nationale de Navigation Intérieure et Internationale (CNNII). Cette concession, accompagnée d’un ferry de 500 places, marque une étape décisive dans l’ascension du groupe burkinabè, solidifiant ainsi sa place dans les secteurs clés de l’économie gabonaise.

Les entrepreneurs gabonais, grands oubliés de la Transition ?

Pour de nombreux observateurs, ce nouveau partenariat avec EBOMAF soulève des inquiétudes. La promesse faite par le Général Oligui Nguema de remettre les rênes de l’économie aux Gabonais paraît de plus en plus lointaine. En dehors d’un communiqué sur l’attribution des marchés publics de moins de 150 millions de francs CFA aux PME locales, peu d’initiatives concrètes ont vu le jour pour favoriser les entrepreneurs nationaux. Face à cette dynamique, beaucoup redoutent que la domination étrangère sur l’économie gabonaise ne fasse que changer de visage, passant d’Olam à EBOMAF.

### Un protectionnisme éducateur, une solution pour sauver l’économie locale ?

Sans rejeter la coopération internationale, certains analystes plaident pour une application plus stricte du *protectionnisme éducateur*, une théorie économique selon laquelle un pays doit protéger ses industries naissantes pour leur permettre de se développer. L’ouverture excessive aux entreprises étrangères dans un contexte où l’industrie locale est encore faible pourrait, selon cette vision, freiner le développement des acteurs gabonais.

Pour les entrepreneurs locaux, la question qui se pose est simple : le Gabon pourra-t-il un jour compter sur ses propres forces pour mener son développement économique, ou sera-t-il toujours dépendant d’acteurs extérieurs comme EBOMAF, au détriment des aspirations locales ? La réponse à cette question déterminera l’avenir économique du pays et la place des Gabonais dans cette équation.

### Quelle vision pour l’avenir ?

Au-delà des défis politiques et économiques, c’est la capacité du Gabon à renforcer ses compétences internes qui est en jeu. Si la transition doit marquer un tournant, il semble crucial pour le gouvernement de Brice Oligui Nguema de respecter ses engagements en faveur des entrepreneurs gabonais et de mettre fin à la marginalisation des locaux dans la gestion des secteurs stratégiques. L’avenir de l’économie gabonaise pourrait alors être véritablement entre les mains de ceux qui en sont les premiers concernés : les Gabonais eux-mêmes.

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