Kofi Annan meurt «paisiblement» après une «brève maladie»

LIBREVILLE, GABON (medias241.com)- L’ancien secrétaire général des Nations unies (de 1997 à 2006) et prix Nobel de la paix, Kofi Annan est mort samedi 18 août, ont annoncé sa famille et la Fondation Kofi Annan, dans un communiqué commun. Il était âgé de 80 ans. «Il va terriblement manquer à beaucoup de gens dans le monde, comme aux équipes de sa Fondation et à ses anciens collègues des Nations unies. Il restera dans nos cœurs à jamais», écrivent-ils.

Né le 8 avril 1938, Kofi Annan a fait des études supérieures au Massachusetts Institute of Technology avant d’occuper différentes fonctions pour les Nations unies à partir de 1962.

En 1993, il est sous-secrétaire général des Nations unies et dirige le département de maintien de la paix.

Le diplomate est mort « paisiblement » après une « brève maladie », indiquent ses proches sans donner plus de précisions. Son entourage a annoncé vouloir faire son deuil dans l’intimité, ajoutant que les dispositions prises pour « célébrer sa remarquable vie » seront annoncées ultérieurement. Son pays natal, le Ghana, a d’ores et déjà décrété une semaine de deuil national en son hommage.

Ayant occupé de nombreux postes au sein des Nations unies, l’ancien secrétaire général a connu nombre de succès, d’échecs et de polémiques.

  • 1992 : l’échec en Yougoslavie

Pendant la guerre en Yougoslavie, Kofi Annan est chef adjoint des opérations de maintien de la paix, spécifiquement chargé de cette région. L’ONU, qui est incapable de mettre fin à la guerre, y connaît l’un de ses principaux échecs : le massacre de Srebrenica. Un événement qui suscitera un mea culpa de la part de Kofi Annan et des Nations unies : « Par nos graves erreurs de jugements et notre incapacité à comprendre l’ampleur du mal auquel nous étions confrontés, nous avons échoué à faire notre part pour protéger les habitants de Srebrenica face aux campagnes planifiées de massacres par les forces serbes, écrit le diplomate ghanéen en 1999. Srebrenica cristallise une vérité que l’ONU et la communauté internationale ont comprise trop tard : la Bosnie-Herzégovine était autant un conflit militaire qu’une cause morale. »

  • 1994 : le génocide du Rwanda

Nouvel échec de celui qui est devenu le responsable des opérations de maintien de la paix : le génocide du Rwanda. Là encore, Kofi Annan reconnaîtra quelques années après les erreurs commises par l’ONU, lors d’un discours devant le Parlement rwandais, en 1998 : « Aujourd’hui, nous savons que ce que nous avons fait alors était loin d’être suffisant ; pas assez pour protéger le Rwanda contre lui-même, pas assez pour honorer les idéaux pour lesquels les Nations unies existent. »

  • 17 décembre 1996 : discours d’investiture

Kofi Annan démarre son premier mandat en janvier 1997. Dès son discours d’investiture, il annonce qu’il aura pour objectifs d’« assainir les Nations unies, les rendre plus présentes et plus efficaces, plus sensibles aux souhaits et aux besoins de ses membres et plus réalistes dans leurs buts et engagements ».

  • 1998 : création de la Cour pénale internationale

En juillet 1998 est adopté le Statut de Rome, qui crée la Cour pénale internationale, juridiction pénale permanente chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime contre l’humanité, de crime d’agression et de crime de guerre. Elle démarre son action en 2002, malgré la réticence des Etats-Unis et de la Russie, membres du Conseil de sécurité de l’ONU, qui n’ont jamais ratifié le texte, tout comme la Chine, qui ne l’a pas signé.

  • 1998 : médiation auprès de Saddam Hussein

Alors que les Etats-Unis veulent bombarder l’Irak, Kofi Annan parvient à désamorcer la crise en obtenant de Saddam Hussein qu’il consente à un protocole autorisant les inspecteurs des Nations unies à visiter tout site suspect en Irak.

  • 2000 : rapport du millénaire

En avril 2000, le secrétaire général publie un rapport du millénaire. De ce rapport, qui appelle les chefs d’Etat et de gouvernement à faire de la lutte contre la pauvreté et contre les inégalités la priorité du début du nouveau millénaire, seront inspirés les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

  • 2001 : réélection et prix Nobel

En juin 2001, Kofi Annan est réélu par acclamation de l’Assemblée générale. En décembre, il obtient le prix Nobel de la paix, conjointement à l’ONU, en hommage à leur action commune pour la paix et la justice dans le monde. Le comité a salué le secrétaire général, qui « a été en pointe pour insuffler une nouvelle vie à l’organisation », en relevant de « nouveaux défis », tels le « terrorisme international » et le sida.

  • 2003 : guerre en Irak

Le secrétaire général cherche à éviter la guerre en Irak, exhortant les Etats-Unis et le Royaume-Uni à ne pas envahir le pays sans le soutien de l’ONU. Il déclare cette guerre illégale en septembre 2004. Kofi Annan parlera par la suite de cette période comme de son « plus mauvais moment » à la tête de l’organisation.

  • 2005 : scandale du programme « Pétrole contre nourriture »

Le secrétaire général est mis en cause dans une enquête sur les errements du programme onusien « Pétrole contre nourriture ». L’opération devait permettreau régime irakien de vendre du brut en échange de biens de consommation, pour atténuer les effets de l’embargo sur les civils irakiens. Mais les enquêteurs estiment que, en sept ans, Saddam Hussein a détourné près de 1,8 milliard de dollars sous le nez de l’ONU. Selon l’investigation, Kojo Annan, le fils de Kofi Annan, a pour sa part « tenté d’intervenir dans la passation de marché ». Il aurait aussi utilisé le nom de son père pour acheter à prix réduit une Mercedes à 39 000 dollars.

  • 2012 : démission du poste de médiateur en Syrie

Après avoir quitté la tête de l’ONU fin 2006, Kofi Annan reste engagé sur les questions internationales. Il est nommé, le 23 février 2012, médiateur de l’ONU et de la Ligue arabe en Syrie, mais en démissionne quelques mois plus tard, le 31 août, estimant ne pas avoir « reçu tous les soutiens que la cause méritait »« La militarisation croissante sur le terrain et le manque d’unanimité au Conseil de sécurité ont fondamentalement changé mon rôle », expliquait-il.

De nombreux hommages

L’actuel secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a rendu hommage samedi à son prédécesseur : « Une force qui guidait vers le bien. (…) De bien des manières, Kofi Annan était les Nations unies. » La mission permanente de la France auprès de l’ONU a exprimé sa « grande tristesse », à la suite de la mort de « ce défenseur infatigable des droits de l’homme, du développement, de la lutte contre la pauvreté et les discriminations ».

Le président russe, Vladimir Poutine, a adressé un message à l’actuel successeur de Kofi Annan, rendu public par le Kremlin. « J’ai sincèrement admiré sa sagesse et son courage, sa capacité à prendre des décisions réfléchies, même dans les situations les plus complexes et critiques. Son souvenir restera à jamais dans le cœur des Russes », écrit-il.

Emmanuel Macron, de son côté, a souligné que ni « son regard calme et résolu, ni la force de ses combats » ne seraient oubliés. « C’était un homme qui incarnait la conscience humanitaire et la conscience internationale », a salué l’ancien ministre des affaires des affaires étrangères, Bernard Kouchner à l’Agence France-Presse.

Hubert Védrine, au quai d’Orsay durant cinq années (1997-2002), toutes pendant le mandat de M. Annan, se souvient qu’il était « assez idéaliste sur le plan des grandes valeurs, mais c’était en même temps un praticien du monde réel, donc c’était formidable de travailler avec lui ». Il était « extraordinairement distingué, avec beaucoup de finesse, de maîtrise de soi », malgré « les problèmes terribles que l’on peut rencontrer quand on est secrétaire général de l’ONU » et le fait que celui-ci ne dispose d’« aucun pouvoir en propre », poursuit M. Védrine.

Pour François Louncény Fall, Chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale : «Kofi Annan fut un véritable soldat du maintien de la paix dans le monde».

 «J’ai appris ce matin avec beaucoup de tristesse la nouvelle de la disparition de Kofi Annan, ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, organisation à laquelle il a consacré toute sa vie. Kofi Annan fut un véritable soldat du maintien de la paix dans le monde et un ardent défenseur du Multilatéralisme dans les relations internationales. J’ai eu l’honneur de travailler à ses côtés et d’apprécier ses grandes qualités de diplomate, en tant que son Représentant spécial pour la Somalie. Mes sincères condoléances à son épouse, à ses enfants et à ses nombreux amis à travers le monde. Repose en Paix très cher Kofi. Ton œuvre au service de la paix te survivra».

 

 

 

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