Interview –Alia Maeva Bongo Ondimba : « L’AGASA travaille pour sécuriser les consommateurs »

Le 10 juillet 2019, l’Agence gabonaise de la sécurité alimentaire (AGASA), a procédé à la remise d’agréments sanitaires à trois opérateurs économiques exerçant dans la commercialisation de l’eau reconditionnée.
Pour mieux comprendre les raisons qui ont motivé cette décision, notre rédaction s’est rapprochée d’Alia Maeva Bongo Ondimba, première responsable de cette agence.

MEDIAS241.COM : Tout d’abord, qu’est-ce que l’eau reconditionnée ?

Alia Maeva Bongo Ondimba : Au départ, il existe des eaux de plusieurs types. Nous allons exclure tout ce qui est eau minérale et eau de source qui sont puisées dans des nappes phréatiques protégées de toute pollution humaine. L’eau reconditionnée est une eau dite de table, fruit de la transformation et du reconditionnement de l’eau du robinet. Ces eaux qui sont commercialisées sur les différents marchés et touchent un grand nombre de consommateurs.

MEDIAS241.COM : Quelles sont les stratégies mises en place par votre structure pour s’assurer de la qualité de l’eau reconditionnée dans notre pays ?

Alia Maeva Bongo Ondimba : Depuis sa création l’AGASA travaille à protéger les consommateurs et leurs droits. L’agence a mis en place un dispositif d’agréments pour sécuriser les consommateurs. Il vise aussi une meilleure collaboration entre les acteurs économiques et nos services. Notre travail consiste à s’assurer que les produits mis en vente respectent les conditions d’hygiène et de sécurité ainsi l’eau que nous contrôlons a pour obligation de répondre à toutes les normes, faute de quoi elle ne sera pas commercialisée.

MEDIAS241.COM : Quelles sont les normes et obligations pour obtenir l’autorisation de commercialiser ?

Alia Maeva Bongo Ondimba : Il existe cinq conditions à remplir pour avoir le quitus de l’AGASA. La première est la structuration de l’établissement, il est primordial de savoir par exemple où se trouve l’unité de production? Car la réglementation proscrit à toute entreprise du secteur d’avoir son unité de transformation dans un lieu d’habitation Les enfants, les animaux ou encore la proximité des toilettes sont des facteurs-risque de pollution trop importants et une eau contaminée peut-être à l’origine de différentes maladies.
Ensuite, il y a la méthode de recueillement d’eau et le matériel utilisé pour effectuer cette tâche. Avec quel matériel l’opérateur la retransforme et la rendre pure? Le dispositif connaît un audit complet pour voir s’il répond aux normes, notamment en matière de température.
En troisième position, il y a la problématique de la main-d’œuvre. Chaque agent exerçant dans l’établissement en question doit disposer d’un diplôme en qualité d’hygiène et en sécurité environnementale. Il a aussi pour obligation de respecter les normes de protection avec des EPI (NDLR : Équipement de Protection Individuelle) de bonne qualité et dans un état optimal d’utilisation. Il faut évidemment contrôler le point d’accès des travailleurs à la salle production.
Pour ce qui concerne le quatrième aspect, il est question de vérifier la matière première. A partir du moment où l’eau sort d’une machine, l’AGASA vérifiera son conditionnement et effacer toute suspicion de contamination. Le sachet et le gobelet doivent remplir les normes de conditionnement. Les échantillons une fois traités, sont envoyés en laboratoire où différentes batteries de tests sont effectués pour analyse. Ces tests nous permettent d’affirmer avec une extrême précision si l’eau est propre à la consommation ou non.
La dernière tâche se résume à la vérification du nettoyage de l’unité de production. Le terme exact est le plan de maîtrise sanitaire qui englobe toutes les stratégies que l’entreprise met en œuvre pour réduire ou éliminer les risques de contamination. Nous accompagnons évidemment les opérateurs dans ce processus de maîtrise sanitaire car notre objectif est qu’il y ait un maximum de producteurs « clean ». Cette multiplication des acteurs étant au profit des consommateurs qui bénéficient de meilleurs prix grâce au jeu de la concurrence. Cependant en cas de non-conformité, nous obligeons les entreprises à régulariser toutes les infractions et à se conformer aux normes en vigueur. En fonction de la gravité des faits, la sanction peut aller d’une amende conséquente, à une fermeture temporaire voire complète des établissements. Sur quinze opérateurs contrôlés et suivis, il n’y a que trois entreprises qui ont su remplir les règles que nous imposons, raison de la suspension des autres.

MEDIAS241.COM : En donnant quitus à ces trois entreprises, l’AGASA n’empiète-t-elle pas sur les prérogatives de la Société d’Énergie et d’eau du Gabon (SEEG)?

Alia Maeva Bongo Ondimba : L’amalgame n’a pas lieu d’être. Pour faire simple, il faut savoir qu’aujourd’hui, l’entité compétente pour délivrer une autorisation d’exploiter l’eau extraite des nappes phréatiques est la SEEG. Son expertise permet de déterminer à quelle profondeur l’entité doit creuser pour remonter de l’eau considérée comme saine et salubre. Ce qu’il faut savoir c’est que les textes juridiques nous donnent la compétence de juger qu’une eau est saine et salubre quand elle est classée comme une denrée alimentaire. Pour vous parler de façon plus concrète, tant que l’eau est prise dans un robinet, elle relève encore de la responsabilité de la SEEG. Mais une fois que cette eau est conditionnée en sachets, en bouteilles ou en gobelets, son contrôle ne relève plus de la SEEG, mais de l’AGASA. À partir de ce moment, c’est nous qui certifions si cette eau est bien saine, salubre et qu’on peut la consommer. Sachez que la SEEG dispose d’un laboratoire de contrôle. Il en est de même de la direction générale de la consommation et de la concurrence (DGCC). Ces deux laboratoires et l’AGASA sont au demeurant complémentaires ».

MEDIAS241.COM : L’eau reconditionnée par les opérateurs agréés est-elle celle sortie des robinets de la SEEG ?

Alia Maeva Bongo Ondimba :  »Nous sommes sûres de nos vérifications, d’autant plus que dès ma prise de fonction, j’ai instauré des plans de surveillance des eaux conditionnées qui n’épargnent aucune entreprise. C’est pour vous dire que si nous avons agrée trois opérateurs, c’est parce que cela fait deux voire trois ans que nous les suivons de près et qu’ils respectent les normes. Aucune fuite n’est possible et les règles que nous exigeons sont très strictes. Mais nous n’utilisons pas que la sanction comme seul mode de contrôle. Nous accompagnons les opérateurs parce que nous sommes conscients que s’ils ne sont pas encadrés, ils peuvent enfreindre la réglementation sans le savoir. Nous jouons un rôle important dans la sensibilisation et avons l’obligation de faire comprendre aux opérateurs que le business de l’eau n’est pas une affaire dans laquelle on peut jouer impunément avec la santé des consommateurs.

MEDIAS241.COM : Vous parlez très souvent des consommateurs…

Alia Maeva Bongo Ondimba : C’est un commerce qui interpelle notre responsabilité. Il est important que le consommateur soit protégé. Il faut que l’opérateur soit suffisamment conscient que si l’eau qu’il vend s’avère impropre à la consommation et qu’il la livre aux consommateurs, il contamine des gens tous les jours. C’est pourquoi si nos services n’ont pas accès aux pratiques d’un opérateur, nous estimons automatiquement qu’il vend de l’eau impropre à la consommation. A ce moment-là pas de tergiversation possible, soit on procède à des saisies, soit on procède à des destructions. C’est en ce sens qu’on utilise les forces de l’ordre pour interdire à toute entreprise qui échappe à nos services de contrôle de déverser son eau conditionnée sur le marché et nous sommes aujourd’hui habilités à le faire. À la fin le consommateur fait le choix de l’eau certifiée qui correspond à son goût.

MEDIAS241.COM : Un dernier mot ?

Alia Maeva Bongo Ondimba : « Je lance un appel aux consommateurs. S’ils veulent acheter de l’eau dans les marchés qu’ils s’assurent que l’eau qu’ils se procurent est de bonne qualité et que leur choix est celui de l’AGASA ».

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